Chants de procession dans la liturgie catholique ancienne, avant le chant de l’Evangile

Séquences :Origine du mot : lat. Sequire, suivre (en marchant).

Graduels :Origine du mot : lat. Gradum, le degré, la marche.

Traits :Origine du mot : lat. Tractus, étirement, développement.

Les Graduels sont une série de motets chantés à la fin des processions en plain chant (voir Séquences) qui mènent les célébrants dans la nef devant les 3 marches qui la séparent du choeur, avant la lecture de l’Evangile. Elles sont devenues des pièces méditatives, de même que le Tractus, chanté durant l’encensement de la Bible et de son Lecteur.

A l’origine de ces processions, des chants de marche, appelées donc Séquences, déjà avant Charlemagne, sous forme de stances. Syllabiques parce qu’une note correspond à une syllabe.

Peu à peu ornés et polyphoniques, les Graduels regroupent au moment de la Renaissance tous les moments des liturgies, tant anglicane que catholique, pour lesquelles Byrd ( 1536-1623) composait avec un égal souci d’approfondissement des textes et nous lègue 2 recueils de Gradualia. De même Monteverdi ( 1567-1643), ouvrait avec ses motets la voie au madrigal. Les Graduels se confondent peu à peu avec les Traits.

Présentation à l’occasion d’un concert donné dans l’ancienne église de Saint-Hippolyte-sur-le-Doubs

La collégiale de Saint-Hippolyte sur le Doubs a une longue histoire médiévale, qui comprend l’accueil du Saint-Suaire de Turin au 15è siècle. Et auparavant, grâce au Comte Jean de la Roche dont la famille est intimement liée au rayonnement de ce haut-lieu du Jura, lui-même rattaché par son nom aux grandes œuvres de la mythologie grecque (le Géant qui délie les chevaux), aux mines de sel, aux sources et aux grottes jurassiennes, une petite équipe de chanoines se fit connaître dans la poésie latine médiévale.

 

Séquences syllabiques au temps de Jacopone di Todi (1230-1306, Italie)

Héritières des chants de marche des premiers disciples de Saint François d’Assise, Umbria, fin 12è siècle, elles se démultiplièrent à l’envi, se codifiant de plus en plus en utilisant le latin parallèlement au premier italien (toscan). Elles sont devenues des chants de procession vers l’autel dans la liturgie chrétienne puis catholique, avant puis après la lecture de l’Evangile. Le texte et la mélodie du Stabat Matersont attibués au franciscain de la première heure Jacopone da Todi, le Dies Iraepour la mélodie à un autre franciscain Tomaso da Celano ou bien au Dominicain de Rome Malabranca Orsini. Le texte, lui, en est très ancien et fut intégré à la récolte de réunification liturgique attribuée au Pape Grégoire le Grand(vers 604), d’où le nom de chant grégorien.

 

En souvenir des pèlerinages médiévaux à Notre-Dame de Saint-Hippolyte, liés en plus au Saint-Suaire et à la tradition poétique liturgique des chanoines du lieu, nous présentons 5 séquences, parmi plus de 2400 (!) répertoriées à ce jour au temps du maître du genre, Jacopone da Todi, disciple de François d’Assise.

Stabat Mater dolorosa (Vendredi Saint)

Victimae Paschali Laudes (Matin de Pâques), à 2 voix, Las Huelgas de Burgos

Lauda Sion Salvatorem (Saint Sacrement)

Veni Sancte Spiritus (Pentecôte)

Dies irae (Office des défunts) avec interludes improvisés sur un organetto copie début XIV ème s.

 

Il s’agit de mélodies à une voix (monodies, cantus planus = plain chant) issues des tropes : ceux-ci consistent, quand la mélodie de la voyelle finale dans l’Alleluia ou le Kyrie est trop longue, à ajouter une syllabe sur chaque note de cette finale si difficile à mémoriser. Peu à peu, ces séquences devinrent indépendantes, c’est le cas ici, et donnèrent, par exemple, le verset chanté après l’Alleluia. Puis ces mélodies de pure poésie médiévale prirent le nom d’hymnes. Au temps de Jacopone, puis des chanoines de Saint-Hippolyte et de tant d’autres poètes- musiciens à travers l’Europe, c’est devenu un genre musical majeur mettant en valeur les usages locaux, non répertorié dans le chant grégorien liturgique, sauf les cinq que le concile de Trente (1545-1563) inséra dans la liturgie réunifiée.

Une deuxième voix, puis même une troisième sont ajoutées par nous selon les coutumes progressives des 11ème, 12ème, 13ème et 14ème siècles, improvisées sur le livre comme on disait. Exception pour la 2ème voix du Victime Paschali Laudes, écrite entièrement dans le monastère espagnol Las Huelgas des cisterciennes de Burgos, vers 1325.

JMC