Fable d’Esope, No 336, Trad Emile Chambry
Poète phrygien du 6è s. a C., à qui on attribue la paternité des fables et que cite Jean de La Fontaine.
LA CIGALE ET LES FOURMIS
C’était en hiver ; leur grain étant mouillé, les fourmis le faisaient sécher. Une cigale qui avait faim leur demanda de quoi manger. Les fourmis lui dirent : « Pourquoi, pendant l’été, n’amassais-tu pas, toi aussi, des provisions ? — Je n’en avais pas le temps, répondit la cigale : je chantais mélodieusement. » Les fourmis lui rirent au nez : « Eh bien ! dirent-elles, si tu chantais en été, danse en hiver. »
Cette fable montre qu’en toute affaire il faut se garder de la négligence, si l’on veut éviter le chagrin et le danger.
LA CIGALE ET LA FOURMIJean de La Fontaine, 1668, Livre 1, 1 La Cigale, ayant chanté Tout l’été, Se trouva fort dépourvue Quand la bise fut venue. Pas un seul petit morceau De mouche ou de vermisseau. Elle alla crier famine Chez la Fourmi sa voisine, La priant de lui prêter Quelque grain pour subsister Jusqu’à la saison nouvelle. Je vous paierai, lui dit-elle, Avant l’août, foi d’animal, Intérêt et principal. La Fourmi n’est pas prêteuse ; C’est là son moindre défaut. Que faisiez-vous au temps chaud ? Dit-elle à cette emprunteuse. Nuit et jour à tout venant Je chantais, ne vous déplaise. Vous chantiez ? j’en suis fort aise : Et bien ! dansez maintenant. |
Bois de chauffe, chauffe le bois
Ton dos sur le lit se préserve
Pour t’éviter d’être aux abois
Quand puiseras dans ta réserve.
En avril sans fil pour les filles
Tu t’assieds aux champs sans jonquille.
Espoir de bonne pluie en mai
Pour que juin soulage à jamais.
Ainsi chante Esope le sain
Quand dansent les folles semaines.
Ton labeur rend le grenier plein,
Fontaine bonne et plaintes vaines.
Mais voici le passant et son besoin.
Sauras-tu lire son chagrin
Et lui donner charge de foin ?
Car ses yeux fourchent sur ta bouche
Qui déborde bien de ta louche
Troublant ta couche sur ta souche.